Compte-rendu de la journée technique “les couverts végétaux en maraîchage”

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La journée technique sur les couverts végétaux en maraîchage organisée dans le cadre du GIEE MSV Drôme-Ardèche et grâce aux financements du ministère de l’agriculture, de la Fondation de France, et de l’agglomération de Montélimar a eu lieu le mardi 17 octobre à St-Gervais-Sur-Roubion. Voici une synthèse des principaux éléments à retenir suite aux interventions d’Amandine Faury, chargée de mission MSV et animatrice du GIEE MSV Drôme-Ardèche, de Hélène Védie, chargée d’expérimentation au GRAB d’Avignon sur la thématique des couverts végétaux et de la fertilité du sol en maraîchage, de Valéry Martineau, maraîcher accueillant la journée, et de Xavier Dubreucq, conseiller technique en maraîchage.  

Le matin, Amandine Faury a présenté les résultats de quelques essais de couverts végétaux réalisés sur les fermes du GIEE. Parmi les couverts d’hiver, il y a eu des essais de : phacélie, avoine + vesce, orge + pois fourrager, et orge + pois fourrager + radis fourrager. Tous les couverts ont permis d’assurer une bonne couverture hivernale des sols et de limiter l’enherbement à -10%. Les reliquats azotés mesurés au cours des essais étaient de plus en plus faibles en hiver, dû à la récupération des nitrates par les couverts. La production de biomasse conduite était variable, entre 2.2tMS/ha et 5.8tMS/ha en fonction des couverts et particulièrement de la date de destruction des couverts, la production de biomasse étant beaucoup plus intense lorsqe les jours s’allongent au printemps, d’où l’intérêt de retarder au maximum la date de destruction lorsque c’est possible. Les performances des couverts dépendent globalement de la proportion des espèces dans le couvert : les graminées produisent plus de biomasse, les crucifères couvrent rapidement et sont concurrentielles (attention à diminuer leur dose en association) et les légumineuses permettent une meilleure restitution en azote pour la culture suivante. La destruction de deux couverts avec un prototype de rouleau FACA manuel a été efficace sur le couvert de phacélie car le couvert était au bon stade (floraison) et que les tiges creuses et lignifiées de la phacélie en font une plante facile à détruire. Cependant, il a été moins efficace sur le couvert d’avoine + vesce notamment car la destruction était trop précoce et que la vesce étaittrop dominante et au sol. Les essais de couvert de printemps ont été moins probants avec des biomasses ne dépassant pas les 2tMS/ha, dû à une période de croissance réduite (destruction mi-mai). Au GRAB, il y a eu des bonnes productions de biomasse (6-10tMS/ha) pour des semis de fin mars et des destructions fin juin. Chez Valéry, un essai d’enherbement avec un couvert permanent dans les passe-pieds de planches bardées avec du trèfle blanc nain a été assez concluant : le trèfle blanc nain reste vert, résiste bien à la sécheresse et au piétinement et reste bas. En revanche il est peu concurrent, il faut donc continuer à débroussailler dans les zones où il y a des adventices.  

Hélène Védie a présenté des résultats d’essais de couverts d’hiver, de printemps et d’été. Plusieurs mélanges d’espèces ont été testés, principalement basés sur l’association d’une céréale (seigle, avoine, triticale, sorgho, millet, moha, niger…) et d’une légumineuse (pois fourrager, féverole, lentille, vesce, trèfle, crottalaire…), parfois avec des crucifères (radis fourrager, navette, radis chinois, moutarde, etc) et d’autres espèces de couvert (phacélie, sarrasin). Les biomasses produites sont variables et dépendent principalement des espèces des couverts et de la période de croissance. Les rapports C/N des couverts à la destruction varient également selon l’état des plantes du couvert à destruction et la proportion de légumineuses : on atteint des C/N élevés avec des couverts riches en graminées et arrivés à maturité, et à l’inverse, des C/N bas avec des couverts fauchés plusieurs fois (sorgho) ou avec des couverts riches en légumineuses. Ces éléments sont à prendre en compte pour ajuster la date de destruction du couvert et la fertilisation de la culture suivante.  

Hélène a ensuite présenté les résultats de deux projets : SoilVeg et Marco qui visaient à tester la technique de plantation dans des couverts végétaux couchés, sans travail du sol et sans plastique. Différentes modalités ont été testées :  

  • Les modalités RF : semis de deux types de couverts d’hiver à la volée sans travail du sol ou sans couvert (RF0), apport de compost de DV en surface, roulage du couvert au rouleau FACA et strip till sur la ligne de plantation et fertilisation localisée.
  • Les modalités EV : semis de deux types de couverts d’hiver à la volée après travail du sol ou sans couvert (EV0), broyage et enfouissage du couvert, travail du sol et plantation classique et fertilisation en plein. 

Les résultats montrent que la technique est faisable mais demande beaucoup de technicité, notamment de semer avant le 15 octobre pour optimiser la production de biomasse du couvert et la gestion de l’enherbement, et de coucher le couvert au bon stade phénologique pour éviter les repousses. Après plusieurs années d’essai, malgré des économies de carburant (-50%) et de temps de travail (-30%), de nombreux inconvénients apparaissent : augmentation de la densité apparente du sol (compaction), apparition de campagnols et de vivaces difficiles à gérer, diminution de la température du sol (-2 à 3°C), pertes de précocité et pertes de rendements de plus en plus importantes (sauf pour la salade) : -15% sur le fenouil, -30 à -50% sur les courges. Les semis étaient très difficiles à réaliser et les levées étaient moindres sur les modalités couchées (RF) pour haricot, maïs, betteraves et courges. Ces différences s’expliquent en partie par de la compaction naturelle liée aux limons qui se prennent en masse. Alors que dans la modalité témoin, le travail du sol couplé aux engrais verts ont permis de créer une structure grumeleuse. Lorsque l’on compare les modalités couvertes dans le système travaillé (EV1 et EV2) avec les modalités sans couverts (EV0), les résultats sont meilleurs avec la présence de couverts végétaux, notamment grâce à la meilleure conservation de l’humidité dans les sols avec les résidus de couverts végétaux.  

Ces résultats mettent en évidence que : 

  • L’arrêt complet du travail du sol n’est pas souhaitable dans tous les types de sols, notamment s’il y a une compaction déjà présente ou si le sol a une tendance naturelle à la compaction (texture limono-argileuse)
  • La technique culturale doit s’adapter aux situations que l’on observe sur la parcelle : structure du sol, enherbement, ravageurs, etc,
  • Il faut combiner différentes techniques pour casser les cycles des ravageurs plutôt que de s’obstiner avec une technique qui ne fonctionne pas ou qui sélectionne des ravageurs.

L’après-midi, nous sommes allés sur le terrain pour comparer les sols de deux parcelles dans des systèmes bien différents chez Valéry Martineau :  

  • La parcelle « MSV » : arrêt du travail du sol depuis 2018 : implantation d’une luzerne (2 ans), puis apport massif de compost de déchets verts en surface (15cm) et création de planches bardées avec passe-pieds enherbés, apports ponctuels de foin en surface, plantation sur toile tissées, utilisation de semences non-hybrides, et limitation des traitements au maximum. 
  • La parcelle « classique » : travail du sol régulier : labour peu profond repris au printemps, apport de fumier de volailles composté et/ou d’engrais en bouchons, paillage plastique ou sol nu et binages. 

Dans le profil de la parcelle « MSV », à texture limono-sablo-argileuse, on voit qu’il y a une bonne activité des organismes du sol, notamment des vers de terre avec des traces de matières organiques intégrées à 20cm et au-delà. Ce premier horizon présente des mottes de taille moyenne, subangulaires très poreuses, avec des agrégats. Un second horizon, situé entre 25 et 35 cm est en revanche plus compacté (mottes angulaires, moins d’agrégats). Cette semelle de labour témoigne des passages d’outils précédents. Pour y remédier, il faudrait passer de préférence un actisol ou une dent michel ou une sous-soleuse (privilégier des dents droites), en dessous de la zone compactée, en conditions réessuyées (ni trop humide, ni trop sec) et implanter à la suite un couvert végétal pour structurer le sol. Ces outils cassent des zones de compaction et génèrent de la terre fine sans bouleverser les horizons. Il faut travailler le sol le moins souvent possible mais aussi souvent que nécessaire. Lors des apports massifs il faut apporter de l’azote en complément d’apports carbonés pour faciliter leur décomposition (ou attendre suffisamment longtemps pour qu’il y ait fixation de l’azote de l’air par les bactéries fixatrices libres) : pour un apport de 100m3 de broyat de déchets verts avec un C/N de 50, il faut apporter 120 uN pour « équilibrer le bol alimentaire » de la vie du sol.

Dans le profil de la parcelle « classique », à texture sablo-limoneuse, on repère un horizon ameublit de 0 à 20cm, suivi d’un horizon plus compact et de couleur plus foncé de 20 à 40cm (témoin du retournement). A partir de 40 cm, il y a un horizon plus clair et encore plus compacté. Il faudrait ici aussi décompacter et mettre un couvert végétal à fort enracinement et forte production de biomasse. 

Présentation d’Amandine Faury sur les résultats d’essais du GIEE MSV Drôme-Ardèche :

Présentation d’Hélène Védie sur les résultats d’essais du GRAB